Mort de Louis IX sous une tente à Tunis

Baybars envahit tout l’Orient

Après le passage de Louis IX en Terre Sainte  les Mongols ont envahi la région du Moyen-Orient. S’alliant avec  la principauté d’Antioche et  le royaume d’Arménie , ils ont conquis les importants émirats de Damas et d’Alep. En face les Mamelouks d’Egypte se sont alliés le royaume de jérusalemem et le comté de Tripoli pour défendre leurs possessions. Mais le décès du chef mongole  le grand khan Mongka, a obligé les envahisseurs à rentrer chez eux pour les funérailles. Les Mongoles menés cette fois par le khan de Perse Hulagu, sont  revenus peu après  pour  récupérer leurs précédentes conquêtes. Mais cette fois ils ont été battus par Sayf ad-Dîn Qutuz, le sultan mamelouk, à Aïn Djallout en septembre 1260. Fort de cette victoire il s’est emparé de Damas et d’Alep, avant d’encercler les royaumes francs. Baybars avait participé activement au renversement de la dynastie ayyoub au profit de celle des mamelouk. Il a alors réclamé à Qutuz, en guise de récompense,  le poste de gouverneur de Damas. Devant le refus du sultan il le renverse. Plus ambitieux et redoutable guerrier, il a entreprit d’attaquer ce qui reste des Etats latin d’Orient. Ils s’est emparé entre 1261 et 1268 de Césarée, de la forteresse des Templiers (Safed), Haïfa, Toron, Nazareth, Arsouf , Jaffa et Antioche.

Louis IX repart en croisade 

En Europe  Louis IX dit « Saint-Louis » et le pape Urbain IV notamment suivent avec inquiétude ces évènements. Les Etats latins d’Orient sont plus que jamais menacés par un Baybars déterminé à les détruire. L’Occident chrétien va de nouveau devoir aller au secours de l’Orient chrétien. Le souverain pontife décide avec le soutien du roi de France de lever un impôt pour soutenir les chrétiens d’Orient, et organiser une autre croisade. Seize ans après sa première, qui s’est soldé par un humiliant échec, l’occasion de prendre sa revanche en Terre Sainte se présente pour Saint-Louis. Celui-ci envoie même des émissaires pour conclure avec le khan Hulagu (qui a aussi une revanche à prendre) une alliance, pour en finir avec  le sultan mamelouk.

Cette huitième croisade bien que mal accueillie, est décidée pour mai 1270. La flotte de Louis IX part de Cagliari (Italie) le 15 juillet 1270. Le roi est accompagné de ses 3 fils et de plusieurs  personnalités de la noblesse. Le prince Edouard d’Angleterre  doit les rejoindre  avec  sa propre flotte plus tard. Les croisés débarquent à Tunis le 18 juillet, avec l’idée de se rallier en chemin n le sultan Mohammed Mostanser en le convertissant. Celui-ci au contraire appelle Baybars à son secours. Le roi et  ses hommes sont alors sans cesse harcelés  par les musulmans.

Les croisés dans l »enfer de Tunis

Leur séjour en terre tunisienne tourne vite au cauchemar à cause de la canicule, et du manque d’eau potable. La maladie se propage dans le camp croisé, emportant  Jean Tristan (fils du roi) le 2 août, puis le roi lui-même le 25 du même mois. D’autres morts sont à déplorer : Alphonse de Brienne (légat du pape), Hugues XII de Lusignan (comte de la Marche et d’Angoulême), le Maréchal Gautier de Nemours, Raoul Grosparmy (homme d’église, garde des sceaux) et de bien d’autres. Philippe III dit le Hardi prend la place de son père, mais c’est Charles Ier d’Anjou (frère de Louis IX et roi de Sicile) qui dirige les opérations. Etant donnée la situation  il négocie avec le sultan de Tunis une indemnisation, en contrepartie de l’évacuation de Tunis. Il obtient  210 000 onces d’or,  en plus de la liberté pour les chrétiens de prêcher, prier et commercer librement. C’est à ce moment que le prince Édouard d’Angleterre arrive au large de Tunis, où il apprend la conclusion de l’accord. Il continue sa route vers la Terre Sainte avec un millier d’hommes pour sa propre croisade, la neuvième puisque la huitième a déjà  échouée. Son frère Edmond le rejoint en septembre avec  ses propres hommes, puis le roi Hugues III.

La croisade du roi Edouard d’Angleterre 

Après une tentative pour combattre, avec le concours d’Hugues III, roi de Chypre, et des Mongoles (qui n’ont fait que piller et rentrer chez eux), Edouard se rend compte qu’il n’a pas les moyens de défaire Baybars. Il fait alors preuve d’une grande sagesse, et de beaucoup d’intelligence dans la gestion de sa croisade. Avec  Hugues III et l’arbitrage de Charles Ier d’Anjou, il conclut à Césarée le 22 mai 1272 une trêve de dix ans avec le sultan égyptien. L’accord va permettre au royaume chrétien (réduit à Saint-Jean-d’Acre et ses environs) de survivre encore une vingtaine d’année, et d’assurer  dix ans de paix aux chrétiens d’Orient. Mais à peine la trêve arrivée à terme, les Mamelouks repartent  pour  conquérir les dernières possessions des croisés en Terre Sainte. Les derniers Etats latins d’Orient  tombent l’un après l’autre,  la citadelle de Thabor et Saint-Jean-d’Acre aussi  vers la fin mai 1291 malgré la résistance des Templiers et des chevaliers de l’Hospital.  Toute la Palestine retombe entre les  mains des musulmans, sonnant la fin de l’empire latin d’Orient et des croisades.

Le maître et l'élève surpris par l'oncle

ABELARD (1079-1142) et HÉLOÏSE (1110-1164)

« En doutant nous venons à la recherche, en cherchant nous percevons la vérité » dixit Abélard.

Professeur, philosophe et théologien, Pierre Abélard est né à Le Pallet un bourg de Bretagne d’une famille de la petite noblesse. Surdoué pour son époque, il se retrouve à Loches entre 1093 et 1099 où il a comme maître Roschelin (célèbre pour son introduction du nominalisme en logique). Il arrive à Paris vers 1100. A l’Ecole cathédrale de Paris, où il est un brillant élève, il a comme maître Guillaume de Champeaux (archidiacre de Paris et chanoine de Notre-Dame).

Dialecticien avéré maniant le langage et la grammaire à merveille, ses idées agacent même les grands maîtres au point de lui valoir des déboires. Il ose par exemple confronter foi et raison en abordant la théologie (sacrée) avec la rigueur et la méthode du philosophe. Il est se met à la recherche de lien entre la science et la religion, et devient vite un maître de la logique, dépassant ses maîtres. Il est le premier à utiliser le vocable théologie, pour désigner un ouvrage exclusivement consacré aux religions. Écarté pour ses idées de l’enseignement, il crée sa propre école en 1110 sur la Montagne Sainte-Geneviève pour instruire sur la rhétorique et la philosophie scolastique. Il y reçoit des auditeurs de toutes les nations. Cette école deviendra un siècle plus tard Université (la Sorbonne installée par Robert de Sorban). Il Mais il revient par la grande porte, quand on lui offre une chaire dans la prestigieuse Ecole Cathédrale de Paris où la gloire l’attend. Les élèves affluent toujours de partout même de l’étranger pour suivre le maître. Chassé de nouveau par ceux qui combattent ses idées, il se retrouve moine à l’abbaye royale de Saint-Denis, ermite au Paraclet (Champagne) et même abbé réformateur en Bretagne. Il revient à Paris enseigner quelques années, avant de se retirer à cause de ses déboires avec l’Eglise. Il restera le logicien, l’humaniste, le moraliste le plus célèbre de son époque. On lui doit d’être l’un des principaux fondateurs de la méthode scolastique, mais aussi l’acteur le plus important du renouveau des arts du langage de son époque. « En doutant nous venons à la recherche, en cherchant nous percevons la vérité » dixit Abelard.

La rencontre avec Héloïse :

La jeune fille est accueillie par son oncle Fulbert (chanoine laïc dans Notre-Dame) dans l’enceinte de Notre Dame. Elle est déjà brillante avec ses connaissances en lettres classiques (latin, grec et même hébreu). Le chanoine engage alors Abélard comme tuteur de sa nièce pour parfaire son éducation. Elle a 18 ans et lui 40, mais ils tombent vite amoureux l’un de l’autre. L’oncle soupçonneux les surveille. L’amante écrira plus tard « « Sous prétexte d’étudier, nous nous livrions entiers à l’amour …. Notre ardeur connut toutes les phases de l’amour, et  tous les raffinements insolites que l’amour imagine, nous en fîmes l’expérience ».

Les malheurs d’un couple devenu mythique :

Héloïse tombe enceinte quelques temps après. Elle se rend  en Bretagne chez la sœur d’Abelard pour accoucher secrètement, puis les deux amoureux légitiment leur union par le mariage. De retour à Paris elle se réfugie au couvent d’Argenteuil, brillante elle en devient l’Abbesse. L’oncle jaloux et furieux se venge de cette liaison qu’il n’approuve pas d’une manière criminelle, en envoyant ses amis castrer Abélard. Alors que la jeune femme est chassée du couvent, son mari l’installe au Paraclet. Lui-même trouve pour un temps refuge comme moine dans l’abbaye de Saint-Denis. Ils échangent une correspondance de plus de 113 lettres, célèbres par leur contenu. Ainsi par exemple, de sa retraite l’amante écrit même devenue religieuse « les plaisirs amoureux que nous avons goûtés ensemble ont pour moi tant de douceur, que je ne parviens pas à me les délester… » Même durant ses prières elle ne cesse de penser à lui « Au cours même des solennités de la messe, où la prière devrait être plus pure encore, des images obscènes assaillent ma pauvre âme (…). Loin de gémir des fautes que j’ai commises, je pense en soupirant à celles que je ne peux plus commettre ». Le couvent d’Argenteuil chasse la jeune femme, Abélard lui propose de s’installer au Paraclet

Pendant ce temps Bernard de Clairvaux (moine conservateur et prêcheur de la seconde croisade et non moins son ennemi juré) s’acharne sur lui pour ses convictions religieuses certes, mais plus pour son immense célébrité et ses prouesses dialectiques. Il est condamné au concile de Soissons en 1121, puis à celui de Sens en 1141. La condamnation est  même confirmée cette fois par le pape Eugène III, initiateur de la deuxième croisade. Son dernier livre est également condamné.

Unis pour l’éternité 

Leur correspondance qu’ils ont entretenue  séparés, mélange de passion et de piété ( qui correspond bien à l’amour courtois de  l’époque), montre bien que les deux amants ont continué à s’aimer toute leur vie. Héloïse devient abbesse d’un couvent à Provins qu’elle gérera elle-même. Adélard n’est pas loin, il fonde non loin de là à Paraclet son monastère. Se voient-ils tout ce temps secrètement ? Nul ne peut l’affirmer, puisque qu’il n’est pas fait mention dans aucune des lettres. Ils y demeurent jusqu’à leur mort, lui une vingtaine d’années avant elle. Ils resteront unis dans la mort pour l’éternité, puisqu’ils seront mis dans le même cercueil main dans la main. Sur l’initiative de la Mairie de Paris, leurs ossements sont transférés tout comme ceux de Molière, La Fontaine et de pères jésuites en 1817 au lendemain de la Révolution. Ils figurent désormais dans la collection du musée des monuments français, au cimetière Père Lachaise.  Ce couple mythique n’a pas laissé indifférent. Jean Jacques Rousseau lui-même s’est inspiré de la vie d’Héloïse en écrivant « Julie ou la Nouvelle Héloïse » en 1761. Plus près de nous  en 1991, un jardin de 8000m2  « le square Héloïse et Abélard » dans le 13ème arrondissement  leur est dédié. Plus près encore le chanteur américain Frank Black, chante « Héloïse », une chanson inspirée de l’héroïne du Moyen âge.

Œuvres de Pierre Abélard :

De unitate et trinitate divina, sive Theologia Summi Boni (De l’unité et de la trinité divine, ou Théologie du Bien Suprême, 1120) :

Dans cet ouvrage, on découvre le terme théologie que l’auteur est donc le premier à utiliser. Il est écrit que Dieu ou substance divine est trois personnes « le Père », « le Fils », et « le Saint-Esprit », c’est à dire puissance, sagesse et bonté. Pourtant il n’y a qu’un seul Dieu, formé de la réunion de ces trois aussi différents les uns des autres. Pour l’auteur la foi est l’opinion que l’on se fait des réalités cachées, non évidentes. Il est accusé de trithéisme, alors que l’ouvrage est condamné lors du concile de Soissons en 1121 sous la pression de Bernard de Clairvaux, ennemi juré d’Abelard.

Sic et Non (Oui et Non, ou c’est ça ou ce n’est pas ça, 1122):

L’ensemble de l’ouvrage est disposé selon trois catégories. Foi, sacrements et charité sont abordés avec l’esprit d’un maître es arts du langage. L’auteur y relève les contradictions qu’il y a dans les écrits des Pères de l’Eglise. Il pose un certain nombre de questions sur leurs affirmations qui s’opposent souvent, et auxquelles il tente de répondre. Pour lui le respect à l’autorité de ces gens ne doit pas empêcher l’effort de s’interroger et de chercher la vérité. La critique doit être libre car elle permet d’exciter la personne en quête de vérité clé de la connaissance. « En doutant nous venons examiner, et en examinant nous atteignant la vérité » résume bien sa pensée. Abelard semble bel et bien remettre en cause l’autorité établie, ce qui lui vaut une fronde d’Hommes d’Eglise.

Ethica sive Scito te ipsum (Éthique, ou Connais-toi toi-même, 1139 ou 1125) :

L’auteur s’inspire des propos d’Héloïse dans cette œuvre de logique. Ils lui suggèrent que toute théorie morale est fondée avant tout sur l’intention, c’est-à-dire pas ce qui se fait mais plutôt dans quel état d’esprit cela se fait. « La culpabilité n’est pas dans l’acte mais dans la disposition de l’esprit. La justice pèse, non les actes, mais les intentions. Or mes intentions à ton égard, tu es le seul qui peut en juger, puisque tu es le seul à les avoir mises à l’épreuve » dixit Héloïse. C’est  ainsi  qu’Abelard considère que le péché ce n’est pas tant mal faire (le résultat), mais plutôt l’intention de  nuire. Pour  lui donc ce n’est pas le résultat de l’action (qu’il considère matérialisme moral) qui doit être jugé mais plutôt l’intention elle-même.

Dialogus inter Philosophum, Christianum et Iudaeum, sive Collationes (« Dialogue entre un philosophe, un chrétien et un juif, ou conférences », 1136-1139 ou 1125-1127) :

L’auteur traite dans cet ouvrage du dialogue interculturel. Il met en scène des personnages imaginaire ou qui lui apparaissent dans un rêve qui s’engage dans un débat sur le bien suprême et le bonheur. Alors que le philosophe dit ne suivre que la raison naturelle, le chrétien défend la chrétienté selon un angle philosophique et le juif suit l’ancienne loi.

Carmen ad Astralabium (Poème à Astrolabe, 1132-1139) :

Poème dans lequel la plus grande partie des vers contient des instructions morales assez générales et traditionnelles. On y trouve de nombreuses références aux saintes Ecritures, et aux œuvres des Pères de l’Eglise. Texte didactique de nature morale dédié à son fils Astrolabe, c’est tout un programme de formation éthique pour un jeune homme de l’époque qui est proposé.

Historia calamitatum (Histoire de mes malheurs, vers 1132) :

Il s’agit d’une longue lettre adressée à un ami inconnu mais dans la peine comme lui (qui n’est peut-être qu’un personnage imaginaire), dans laquelle Abélard expose les épreuves, les persécutions, le martyr dont il a été victime à cause de ses idées et de son amour pour Héloïse. La lettre commence par « Aussi, après vous avoir fait entendre de vive voix quelques consolations, je veux retracer à vos yeux le tableau de mes propres infortunes : j’espère qu’en comparant mes malheurs et les vôtres, vous reconnaîtrez que vos épreuves ne sont rien ou qu’elles sont peu de chose… » Il fait état de sa rencontre avec Héloïse et de leur amour, qui leur a valu bien des malheurs « …nous fûmes d’abord réunis par le même toit, puis par le cœur. Sous prétexte d’étudier, nous étions tout entiers à l’amour… » Il raconte son ascension fulgurante jusqu’à faire des jaloux et des ennemis. A propos de son premier maître Guillaume de Champeaux, il écrit « … je ne tardai pas à lui devenir incommode, parce que je m’attachais à réfuter certaines de ses idées,…les partisans les plus passionnés de ce grand docteur et mes adversaires les plus violents l’abandonnèrent pour accourir à mes leçons… »

Sententiae Parisienses (Sentences de Paris ou Sentences théologiques, après 1138):

Cette œuvre nous renseigne bien sur les idées qu’il se fait de la foi en Dieu et du Christ, tout comme des sacrements et de la morale. Elle consacre son principe selon lequel toute vertu est charité. Sententiae Parisienses sont un véritable enseignement moral.

Confessio fidei ad Heloisam (Profession de foi à Héloïse, 1141)

Abelard répond pour la troisième fois indirectement à Saint Bernard qui l’accuse d’hérésie. Il s’explique et se justifie en ce qui concerne sa position théologique, ses croyances divines. Dans ce qui est considéré comme la dernière lettre de l’amant à sa femme, il le fait d’une manière accessible à tous pour être bien compris.

« Ma soeur Héloïse, toi qui m’étais autrefois si chère dans le siècle et qui m’es aujourd’hui plus chère encore en Jésus-Christ, la logique m’a rendu odieux au monde. Des pervers qui pervertissent tout et dont la sagesse est toute occupée à nuire… Je renonce au titre de philosophe, si je dois être en désaccord avec Saint Paul; je ne veux pas être un philosophe pour être séparé du Christ….  Je crois en Dieu, le Père, le Fils et le Saint Esprit, seul et vrai Dieu, qui admet la Trinité dans les personnes sans jamais cesser de conserver l’unité dans la substance… Je reconnais que le Saint Esprit est consubstantiel et égal en toutes choses au Père et au Fils, et je l’ai souvent désigné dans mes écrits sous le nom de bonté suprême… »

Autres œuvres :

Theologia Christiana (Théologie chrétienne, 1124)

Theologia Scholarium (« Théologie scolaire, Introduction à la théologie, 1133-1137)

Commentaria In Epistolam Pauli ad Romanos (Commentaires sur l’épître aux Romains de saint Paul vers 1139).

Apologia contra Bernardum (Apologie contre Bernard de Clairvaux,1139-1140) : Première réponse aux accusations d’hérésie de Bernard Clairvaux (Saint Bernard plus tard).

Confessio fidei Universis (Profession de foi universelle) : Deuxième réponse à Saint Bernard.

Epistolae I-VIII ( Règle pour le Parac

Guillaume IX le comte-poète

Les écrivains du Moyen Âge : 

Sans tous ces hommes et ces femmes, nous ne connaîtrions pas grand-chose du moyen âge. Nous commençons avec Guillaume IX, la présentation des écrivains et poètes de cette époque ainsi que leurs oeuvres.

GUILLAUME IX de Poitiers (1071-1126) :

Né le 22 octobre 1071 Guilhem IX de Peitieus en limousin est le premier troubadour, fondateur de la poésie occitane donc en langue romane (ou vulgaire de l’Europe médiévale). Duc d’Aquitaine et Comte de Poitiers, grand-père d’Aliénor d’Aquitaine (reine de France puis d’Angleterre), puissant et riche seigneur prince, héros même d’épopées (première croisade, campagne contre les Maures en Espagne…), il est le premier poète médiéval depuis saint Fortuna (Vie siècle). Il est considéré comme l’un des précurseurs de l’amour courtois. Même s’il évoque la guerre et ses conséquences, il traite surtout de la joie de vivre, des femmes et de l’amour. Ce qui fait de lui certainement, le premier poète à s’engager dans l’écriture érotique. L’expression littéraire de Guillaume dévoile deux aspects contradictoire de sa personne : dérision et cynisme d’un côté, grande courtoisie de l’autre.

Comme ses poèmes sont considérés obscènes et vulgaires, jusqu’à faire état de ses prouesses sexuelles, il est présenté comme un débauché. Sa vie privée (aventures avec les femmes) fait scandale, ce qui lui vaut d’être excommunié par l’évêque de Poitiers. Mais la passion qu’il voue à la Dangerosa (sa maitresse) lui fait découvrir l’amour pur, et que l’homme peut tout aussi bien aimer à la perfection : c’est le « fin’amor » qui l’entraine vers la chanson d’amour pure pour donner naissance à la poésie courtoise. Les textes de Guillaume sont de courts poèmes, des trobars (poèmes chantés) dont il définit lui-même les règles. En ce sens ils contrastent avec les longs récits d’épopées. Il est également connu pour sa passion pour les arts et les lettres. C’est pourquoi sa cour ne désemplit pas, il reçoit souvent des artistes qui viennent parfois de loin.

Troubadour qu’il est, il ne reste pas indifférent aux graves évènements de son époque. S’il profite du départ du comte Raymond IV en croisade (première croisade de  Godefroy De Bouillon) pour annexer Toulouse sa ville, il rejoint celle-ci en mars 1101 accompagné de ses frères Beaudoin et Eustache à la tête de 30 000 hommes. Jérusalem reconquise, il prolonge son séjour pour combattre en Anatolie. Battu puis captif après avoir perdu la presque totalité de ses hommes, il rentre en France une année plus tard (1102). Il part pour une autre croisade en 1220 en Espagne cette fois. Il se bat pendant trois ans dans le royaume de Valence, contre les musulmans pour la Reconquista.

Après une vie de luxure et de débauche dans sa cour, le roi des troubadours consacre la fin de ses jours à la religion avant de mourir en février 1127. Entre-temps il fait reconstruire le palais des comtes de Poitiers, et fait d’importantes donations à l’Eglise. De l’œuvre de Guillaume de Poitiers, malheureusement seules onze pièces et chansons nous sont parvenues. Dans certaines il évoque l’amour, dans d’autres la guerre et ses conséquences sur lui mais de manière plaisante néanmoins (captivité en orient lors des Croisades).

Œuvre connue du troubadour :

Poèmes ou chansons:

Genre descriptif :

« Pos de chantar m’es pres talens »

(Je peux chanter tout ce que m’est pris du talent)

Je peux chanter de mon talent,
Je fais un vers des sentiments,
Je ne serai jamais servant
En Poitou et en Limousin
 
Je partirai, selon l’exil
De la grande peur et du péril,
En guerre, au fils, à ma grande file
Feront, le grand mal, ses voisins.
 
Je quitterai pour l’amitié
La seigneurie de Poitier
Foucon d’Angers, la moitié
De toute ma terre, oh son cousin!…

« Farai un vers de dreyt nien »

(Je ferai un vers d’aucun droit)

Je fais un vers d’aucun giguant
Ni de moi ni d’autre gent
Ni de l’amour ni des jeunes femmes
D’aucun sur vos_rues
Je me trouve alors qu’en dormant
Sur les chevaux_où

 

Je ne sais pas quand je suis né
Ne suis jovial ni irrité,
Ni étranger comme ni privé
N’en puis aller_crû
La nuit où je la dote les fées
Par fois du haut_nu…

« Pus vezem de novelh florir »

(Puisque nous voyons de nouveau fleurir)»

Nous voyons, de nouveau, fleurir
Les vergers avec les prés verdir
Que les fontaines fassent le plaisir,
Souffle le vent
Que la joie lui soit départie
Plus doucement.
 
Dis bien d’Amour, et je le loue
Pourquoi je n’ai ni peu ni prou?
Car je le chante je cave le trou
Que la grande joie
Nous soit donné plus aisément,
J’observe ses lois…
 
« Ben vuelh que sapchon li pulzor »(version 1)

(Bien on veut que on sache le contraste)

 Je voudrais bien comme la plupart des gens de savoir
si ce verset est bien conçu.
J’ai le produire à partir de mon atelier,
depuis que je suis vraiment le champion de cet art
et il est vrai
et je venir comme témoin ce verset lui-même
quand il est fait.
 
Je sais que la sagesse et la folie bien,
et je sais que la honte et de l’honneur
et je dois à la fois peur et le courage;
et si vous proposez un amour du jeu
, je ne suis pas si stupide
que je ne peux pas dire le meilleur
parmi les médiocres.
 
Je sais bien que ceux qui veulent du bien
et ceux qui me haïssent aussi bien
et je sais qui rend joyeux avec moi,
et si messieurs enojy mon entreprise,
je suis tout à fait conscient
que je dois prendre soin de leur confort
et de leur amusement…
 
« Ben vuelh que sapchan li pulzor»(version 2)

(Je veux qu’on chante de la pudeur)

Je veux qu’on chante de la pudeur
Qu’on sache s’elle est de bonne couleur
Ce « vers » très bref prend son auteur
De son métier, j’emporte la fleur,
En vérité,
J’ai le témoin du « vrai acteur »
Qui est lacé.
 
J’ai vu les fous et les penseurs,
J’ai vu la honte avec l’honneur
Et j’ai connu l’audace, la peur
Et son amour, comme leur jongleur,
Je n’en suis pas
Sot que je ne sois pas meilleur
Parmi les choix…
 
Narration sarcastique :

«I Companho, faray un vers … convien »

(Compagnon, je ferai un vers… convenable)

Amis, je ferai un vers qui vous intéresse
 
Amis, je ferai un vers qui vous intéresse
Parce qu’il aura plus de folie que de sagesse,
Trouvez le pêle-mêle l’amour, la joie, la jeunesse.
 
Tenez-le pour un vilain celui qui ne comprend
Jamais, et par cœurs des volontiers je ne l’apprends
 
Pas. Ils se séparent de l’amour selon leur talent.
 
J’ai pour ma selle deux chevaux, alors je suis content;
L’un se dresse au combat, par contre l’autre est vaillant
L’un ne supporte pas l’autre, et ils n’écoutent pas les gens…
 

«II Compaigno, non puosc mudar qu’eo no m’effrei »

(Compagnons, je ne me défends pas de quelque émoi)

Compagnons, je ne me défends pas de quelque émoi
Au thème des nouvelles, je les entends et je les vois
A savoir les gardiens violés qu’une dame appelle à moi
Elle dit qu’ils ne voudraient accepter ni droit ni loi,
Alors qu’ils la tiennent enfermée toujours à eux trois,
L’un lâche un peu, d’autant l’autre lui resserre la courroie.
Tels sont les souffrances qu’ils lui causent, alors c’est pourquoi
Avec elle l’un est le charmant chevalier très courtois
Ils mènent beaucoup le grand bruit que la « mission » du roi…
 

 «V Farai un vers, pos mi sonelh »

(Je ferai un vers puisque je suis endormi)

Je fais un vers fils du sommeil
Je me fatigue sous le soleil
Sache que les dames du mal conseil,
Font le scandale,
Selon l’amour d’un chevalier
Elles tournent au mal.
 
La dame fait un péché mortel
Elle n’aime pas son chevalier miel.
Qui aime un moine et un clerc ciel?
Quelle est raison?
Par le droit, l’homme doit la bruler
Comme un tison.
 
Quand, en Auvergne, en Limousin,
Je vais sans bruit comme le copain
Je trouvai deux femmes: de sire Garin
Et de Bernard;
Elles me saluèrent aimablement
Pour saint Leonard…

«VIII Farai chansoneta nueva »

(Je ferai la chansonnette nouvelle).

Moi, ferai-je une chanson nouvelle
Avant qu’il vente ou pleuve ou gèle;
Ma femme me prouve qu’elle m’est fidèle.
Elle me remue: je suis son chien.
Que ne soient pas mes males querelles
Je ne veux pas perdre son lien.
 
Je me rends, me livrez pensées,
Qu’elle m’ait dans sa charte en français.
Qu’on ne me tient pas d’insensé,
Sans ma bonne femme, si je l’aime,
Je ne vis nulles lois confessées
Tellement de l’amour, j’ai faim…
 

Genre Lyrique :

« Mout jauzens me prenc en amar »

(Gai et jovial je me prends à aimer)

Plaisir, je me prends а aimer,
Je dois partir, bien de la joie,
Je veux revenir et c’est pourquoi
je vais aux mieux si comme jamais
Je te cherche, je suis honoré
Qu’on sache je t’entends: je te vois.
 
C’est la coutume de me vanter
Ni selon les louanges, sais bien dire,
Jamais aucune joie put fleurir
Plus que l’autre, mais elle doit porter
Graine, à coup s’éclaire la beauté…
 

« Ab la dolchor del temps novel »

(A la douceur du temps nouveau) 

Par la douceur d’un temps nouveau
Feuillent les bois et les oiseaux
Chantent chacun en son latin
Selon les vers d’un chant nouveau
Donc il est bien de rechercher
Ce que tout homme a plus envie
 
Pendant que tout m’est bel et bon
Je ne vois signe ou messager
Aussi mon cœur ne dort ni rit
Et je n’ose éloigner mes pas
Pour savoir si sera la fin
Telle ainsi que je le désire
 
De notre amour il va ainsi
Comme une branche d’aubépine
Qui est sur l’arbre et dans la crainte
La nuit au gel ou à la pluie
Mais le matin sous le soleil
Feuille et verdit tout le rameau…
 
Discographie:

Comprend l’intégrale des chansons de Guillaume de Poitiers:

  • Companhon farai un vers qu’er convinen- Companho tant ai agut d’avols conres
  • Ben vuelh que sapchan li plusor-Companho non puosc mudar qu’eo non m’effrei
  • Pus vezem de novelh florir-Mout jauzens me prec en amar / Farai un vers de dreyt nien
  • Farai chansoneta nueva-Ab la dolchor del temps nouvel
  • Farai un vers pos mi soneilh-Pos de chantar m’es pres talens
  • Las Cansos del Coms de Peitieus

Bibliographie sur Guillaume:

  • Les poètes françois, depuis le XIIe siècle jusqu’à Malherbe
  • Pierre René Auguis, 1824
  • Les chansons de Guillaume IX, duc d’Aquitaine (1071-1127)
  • Jeanroy. Paris : Champion, 1913, 1927
  • Les Chansons d’amour et de Joy de Guillaume de Poitiers, IXe duc d’Aquitaine.
  • Jean de Poitiers. Paris: Eugène Figuière, 1926
  • Le Prince d’Aquitaine : essai sur Guillaume IX, son oeuvre et son érotique
  • Jean-Charles Payen. Paris: H. Champion, 1980
  • L’amour libérée ou L’érotique initiale des troubadours
  • Jean-Claude Marol. Paris : Dervy, 1998
  • Guillaume le Troubadour : duc d’Aquitaine fastueux et scandaleux
  • Bernard Félix. Anglet : Aubéron, 2002
  • Le comte de Poitiers, premier troubadour : à l’aube d’un verbe et d’une érotique
  • Pierre Bec. Montpellier : Centre d’études occitanes, 2004

 

Guillaume IX le comte-poète

Les musulmans reprennent Jérusalem 

Frédéric II avait réussi par la négociation à rendre Jérusalem aux chrétiens (traité de Jaffa 1229). Mais il avait quitté la cité précipitamment, inquiet pour ses terres, laissant le chaos en Terre Sainte. La trêve arrivant  à terme, la ville tant convoitée est de nouveau à la merci de tout prédateur. L’émir Al-Nasir Dâwûd, qui avait été chassé de Damas par son oncle El Kamil lors de la sixième croisade, s’était installé en Transjordanie tout près de la Palestine. Il n’attendait en fait que la fin de la trêve pour prendre sa revanche. Il s’empare de Jérusalem en 1239, et s’empresse de raser  la Tour David l’unique forteresse de la ville.

L’Europe orientale est en ce début des années 40 (1241) considérablement affaiblie par les invasions mongoles et Tartares. Les Karismiens dont l’empire avait été détruit par les Tartares, errent le long de l’Euphrate semant  la terreur sur leur passage (1241). Ils font jonction avec le sultanat d’Egypte, qui leur offre de s’établir en Palestine. Ils s’emparent de la ville sainte en août 1244, après avoir massacré une partie de population. Chrétiens du Royaume de Jérusalem rescapés, alliés aux musulmans de Homs et Transjordanie sous domination égyptienne décident de réagir. Une bataille celle de Forbie (Ghaza en Palestine) les oppose alors aux Karismiens, qualifiés de mercenaires, alliés aux Ayyoubides du sultan As-Salîh Ayyûb d’Egypte (qui régnaient également sur le territoire de Homs et Transjordanie). Elle se déroule les 17et 18 octobre 1244, et voit la victoire des seconds  qui vont régner sur la ville sainte. Pendant ce temps en Europe, le pape Innocent IV (élu le 25 juin 1243) est chassé de Rome par Frédéric II. Le souverain pontife se réfugie en 1244 à Lyon où il installe la cour de Rome.

Le voeux du roi

Durant tous ces évènements le roi de France Louis IX est gravement malade. De mauvaises nouvelles lui arrivent d’Orient. Il fait le vœu et s’engage en décembre 1244 d’aller en croisade s’il se rétablit. Le 24 juin 1245 est organisé un concile à Lyon. Les patriarches d’Antioche et Constantinople tirent la sonnette d’alarme sur la situation des chrétiens en Orient. L’évêque de Béryte (actuelle Beyrouth) lit même une lettre des prélats de Palestine, dans laquelle ils supplient leurs frères d’Occident de venir vite à leur secours. Outre la confirmation de l’excommunication de Frédéric II, le concile prêche une croisade à laquelle tient surtout Louis IX. Une croisade pour laquelle toute l’Europe doit se mobiliser, et de concert pour qu’elle ne connaisse pas le même sort que les précédentes. L’idée d’une septième croisade est lancée.

La Septième croisade s’ébranle

Le 27 août 1248 la septième croisade dite des nobles, celle du roi Louis IX  dont le vœu s’est miraculeusement exaucé (guérison), s’ébranle vers l’Orient. Il est accompagné de son épouse Marguerite de Provence, du Comte Robert d’Artois et de Charles d’Anjou, ses frères  et de nombreux chevaliers de grande ascendance comme Joinville, Bourgogne, Chateaubriand, Poitiers, Beaujeu, Pierre de Dreux, Montfort, Coucy, Soissons  etc. L’époque est favorable pour les croisés, car l’empire ayyoubide de Saladin est divisé entre le sultan d’Égypte, l’émir de Damas et celui d’Alep, qui se font la guerre. Mais les circonstances vont être défavorables aux croisés, composés essentiellement de Français, avec quelques milliers d’Allemands, de Norvégiens, d’Italiens, d’Anglais et Ecossais.  Frédéric II avait entre temps envoyé un émissaire avertir le sultan des intentions de Louis IX. De plus la République de Venise, qui ne veut pas perdre ses contrats commerciaux, n’est pas favorable à une expédition en Egypte. Autre contre temps, Ils sont obligés d’hiverner huit mois durant à Chypre, ce qui permet  au sultan Malik al-Salih Ayyoub d’Egypte de mieux se préparer. C’est dans ses conditions que le roi de France et son armée de 8000 chevaliers  embarqué dans une impressionnante  flotte, arrivent à Damiette (Egypte) qu’ils occupent. L’idée est de prendre aussi le Caire pour les échanger contre Jérusalem. Autre contre temps, la crue du Nil les contraint d’attendre, temps qui permet à l’ennemie de se reconstruire.

La croisade échoue 

Le 20 novembre 1249 les croisés  prennent la route du Caire, mais un autre malheur s’abat sur eux : ils sont décimés par la malaria et la dysenterie. Affaiblis, ils sont massacrés par les musulmans à Mansourah, et le roi est fait prisonnier alors que son frère meurt au combat. Le Duc de Bretagne obtient par la négociation la libération de Louis IX, en contre partie de l’évacuation de Damiette et une rançon de 500.000 livres tournois exigée par l’ennemi. Devant le refus des Templiers de prêter cette somme roi, celui-ci envoie le sénéchal Joinville la prendre par la force. Libre, saint- Louis et les survivants quittent le sol égyptien le 8 mai 1250 en direction de Saint Jean d’Acre. Le roi est  bien accueilli malgré la défaite  par les chrétiens d’Orient, notamment les maronites du Liban venus jusque là le saluer et lui manifester leur reconnaissance. Il y passera quatre année pour fortifier  Acre, Césarée de Judée, de Jaffa et de Sidon qui pourraient  être menacés par les mamelouks d’Égypte, plus fanatiques encore que leurs prédécesseurs Ayyoubides. Le roi de France embarque pour l’Europe de Saint-Jean-D’acre le 24 avril 1254. Il est canonisé par l’Eglise romaine en 1297 et devient Saint Louis.

Frederic II et Al Kamil signe le traité

La sixième croisade est considérée comme celle de Fréderic II, fils d’Henri VI,  petit fils de Barberousse Frédéric (troisième croisade), empereur romain germanique et roi des Deux-Siciles. En conflit permanent avec la papauté comme l’était son grand-père, il a fait faux bond lors de la quatrième et cinquième croisade. Ce qui lui a valu le surnom de l’Antéchrist.

Frédéric II au secours d’El Kamil 

En 1224 les princes Ayyoubides d’Egypte, de Damas et d’Alep qui s’étaient dressés ensemble pour faire échec à la dernière croisade, sont de nouveau en conflit. En difficulté face à son frère Al’Muazzam prince de Damas, El Kamil d’Egypte fait appel à Frédéric II. Les deux hommes s’étaient liés d’amitié à travers divers ambassades. L’Egyptien propose en échange d’une aide militaire contre son frère, la rétrocession de Jérusalem. Ce qu’il avait déjà offert à Jean de Brienne, mais que Pélage avait rejeté lors de la cinquième édition, causant l’échec de celle-ci. C’est le moment aussi (1226) que choisit le pape Grégoire IX pour ordonner à l’empereur germanique d’aller en croisade, pour récupérer le la Terre Sainte perdue depuis Saladin, sous peine d’excommunion. Frédéric II se contente d’abord d’envoyer des troupes et des chevaliers, sous le commandement du duc Henri IV de Limbourg et Riccardo Filangieri (noble italien et maréchal impérial du royaume de Sicile) pour épauler El Kamil. Le pape n’apprécie pas  ses tergiversations, il l’excommunie une nouvelle fois le 28 septembre 1227 tout en lui défendant de partir en croisade.

Frédéric II le diplomate

Frédéric II s’embarque pourtant le 28 juin 1228 en direction de la Syrie, sans savoir qu’entre temps qu’El Mu’azzam  l’émir de Damas est mort le 11 novembre 1227. Son but n’est pas de se battre, mais de récupérer Jérusalem par la diplomatie au grand dam des chrétiens et de la papauté. Il débarque  à Saint-Jean-d’Acre le 7 septembre. Il  doit attendre qu’El Kamil en finisse avec le successeur d’El Mu’azzan, son neveu al-Nasir Dâwûd.  Entre temps en Europe, Jean de Brienne son beau frère envahit ses domaines de Naples pour se venger de se qu’il considère comme une trahison. Le souverain européen ne pouvait rentrer à la hâte, au risque de subir une grande humiliation de n’avoir rien fait. Ce n’est que le 18 février 1229 qu’il conclut avec l’égyptien le traité de Jaffa. Le premier  s’engage à la neutralité dans les affaires ayyoubides, en contre partie de quoi le second restitue le Royaume de Jérusalem, Nazareth, Bethléem et leurs environs aux Francs. Ils s’engagent par ailleurs à respecter une trêve de dix ans. Néanmoins l’accord n’est pas du tout apprécié par les populations musulmanes de ces villes cédées. Elles maudissent El Kamil qui les a trahies. Tout comme les chrétiens d’Europe, qui ne conçoivent pas la reconquête de Jérusalem sans les armes.

Une croisade inachevée?

Avant même de séjourner à  Jérusalem devenue chrétienne, l’empereur germain jouissait plutôt d’une bonne réputation chez les musulmans. D’abord il parle couramment l’arabe, et il a toujours manifesté une certaine admiration pour la civilisation musulmane. Dans la ville sainte il se prononce pour le respect de leur religion et leur culture, et leur droit de les pratiquer. Mais il quitte soudainement Jérusalem au bout de trois jours, sans avoir pris le temps de renforcer les fortifications de la ville. Sans roi les institutions du royaume sont livrées à elles-mêmes, les pillards en profitent. La ville est de nouveau à la merci du premier émir venu. Même si les officiers et partisans de Frédéric II rentrent en guerre avec les barons des lieux saints, les musulmans respectent la trêve de dix ans en s’abstenant de chasser les chrétiens. La cité reste chrétienne. L’empereur du Saint Empire Germanique rentre en Europe le 10 mai 1229 après un séjour à Saint-Jean-d’Acre et à Chypre, laissant croire que sa croisade est un succès. Certes, juste le temps de la trêve conclue laissant comme un goût d’inachevé. Malgré tout, il est relevé de son excommunion à son retour  en Europe.

Le siège de Damiette par les croisés

Innocent III veut sa deuxième croisade 

La quatrième croisade a été un véritable désenchantement pour le pape Innocent III qui en fut l’initiateur. Le 3 mai 1512 il convoque un Concile, celui de Latran IV, qui se tient dans la basilique Saint-Jean de Latran de Rome le 11 novembre 1215. Il appelle à une nouvelle croisade, mais meurt peu après le 16 janvier 1216 sans assister à l’évènement auquel il tenait tant. Son successeur Honorius décide en mars 1217 d’aller au bout de ce projet. Le roi André II (Hongrie), le duc Léopold VI (Autriche) et le roi Hugues Ier (Chypre) s’y rallient. Frédéric II l’empereur germanique temporise et se contente de promesses, alors qu’en réalité il ne veut pas se croiser.

André II s’adonne au pillage

Parti début octobre 1217, André II et Léopold VI sont les premiers à arriver aux Lieux Saints. Mais la  croisade du Hongrois peut être assimilée à une expédition, puisqu’il ne fait que piller tout sur son passage et rentrer chez lui avec un important butin. Il accepte néanmoins de laisser une partie de son armée sur place à Acre (Palestine) avec Léopold VI, Hugues Ier et Jean de Brienne (roi de Jérusalem déchu), qui les avaient rejoint peu de temps après. Mais Jean de Brienne comprend qu’il est trop risqué d’attaquer Jérusalem pour deux raisons : les croisés ne peuvent pas être ravitaillés car la ville est trop loin de la mer, et s’ils s’en emparent il serait impossible de la défendre ensuite devant une armée musulmane étant donné l’état de ses remparts. Il a une autre idée derrière la tête. Templiers, hospitaliers, barons syriens et chypriotes, croisés l’approuvent quand il propose de s’attaquer plutôt à la tête c’est-à-dire au sultanat ayyoubide d’Egypte. S’ils arrivent à conquérir Alexandrie ou Damiette ports important de ce puissant Etat musulman qui contrôle Jérusalem en comptant sur l’effet de surprise, ils pourront négocier l’échange avec la ville sainte.

Quand Pelage Galvani ruine tous les espoirs

Les croisés s’embarquent le 27 mai 1218 finalement en direction de Damiette, port stratégique qui donne accès vers le Caire sans traverser le Nil, qu’ils atteignent deux jours après. Le siège dure jusqu’ à novembre 1219 et épuise tout le monde. Les croisés s’emparent de la ville, qu’ils mettent à sac, le 5 novembre 1219. Ils ferment même les mosquées, et ouvrent des églises pour en faire une cité chrétienne. Malik al-Kamel qui a remplacé son père (décédé le 31 août 1218) à la tête du sultanat, propose contre le retrait total des croisés la restitution du Royaume de Jérusalem. Mais Pelage Galvani (fanatique légat du pape de cette croisade), soutenu par les représentants des ordres militaires et des communes italiennes, s’y oppose et passe outre l’avis du principal intéressé Jean de Brienne, dont le but est juste de récupérer son royaume. C’est que le représentant du pape est devenu soudainement gourmand après ce succès, il veut aller plus loin dans la conquête du sultanat. L’Armée occidentale prend la route du Caire mais mal lui en prit. Comme si c’était une malédiction, elle est surprise et décimée par une soudaine crue du Nil. La victoire acquise il y a quelques semaines, se transforme en cauchemar à cause de la cupidité de Galvani. La capitulation est  irrémédiable, les croisés obtiennent  en échange la possibilité de reprendre la mer. Ils quittent la place le 7 septembre 1221 pour rentrer.  On imputera plus tard à lui et  Frédéric II, qui n’a pas rejoint les forces occidentales, l’échec d’une croisade qui avait soulevé de grands espoirs parmi les chrétiens aussi bien d’Orient que d’Occident.

 

Les croisés à l'assaut de Constantinople

La croisade du Pape Innoncent III

Alors que Jérusalem est restée entre les mains des musulmans après l’échec de la troisième croisade (septembre 1192), arrive au pouvoir pontificale Innoncent III le 8 janvier 1198. Celui-ci manifeste aussitôt  sa détermination à reprendre la ville sainte. Le nouveau pape lance dès le 15 août un appel pour l’unité des chrétiens autour de cette noble et sacrée mission. Il va plus loin que ses prédécesseurs : il exige de chaque ville, comte et baron de pourvoir en hommes et à leurs frais la campagne, alors même que l’Europe a d’autres préoccupations et n’est pas vraiment enclin à cette nouvelle aventure. La France et l’Angleterre sont en guerre, alors que l’Allemagne lutte contre le pouvoir papal. Foulques de Neuilly (Curé de Neuilly-sur-Marne et célèbre prédicateur français) arrive par ses prêches à convaincre les plus réticents.  Pour ménager les croisés, il est décidé de se rendre en Terre Sainte par mer. Des contacts sont pris avec les autorités de Venise, pour  négocier le transport des 33 500 croisés prévus et qui financeront la flotte à construire. Et c’est Boniface de Montferrat, comte italien au moment des faits, qui est chargé de diriger cette armée.

Au milieu de l’été 1202, des milliers de croisés convergent vers Venise. Mais au bout du compte les deux  tiers manquent à l’appel. Une partie a préféré se rendre en Orient par d’autres chemins, alors qu’une autre s’est carrément rétractée. Les premiers ennuis commencent pour  Boniface et l’historien Geoffroi de Villehardouin (qui a rapporté cette croisade), qui avait négocié avec Enrico Dandolo (doge ou premier magistrat de Venise). Ils se retrouvent  dans l’impossibilité d’honorer leur contrat, avec seulement un tiers de l’effectif prévu. Le doge empêche les navires, pour lesquels il a mis tous les moyens de la république de Venise, à quitter le port avant que la totalité de l’argent ne soit versée. Les Vénitiens vont tirer profit de cette situation. Ils suggèrent aux francs de remettre à plus tard le paiement de la dette, en contrepartie d’une aide à la reconquête de Zara en Croatie (Zadar en croate). La proposition est acceptée car il n’y a pas vraiment le choix, mais beaucoup de croisés refusent de se battre contre des chrétiens. La ville est malgré tout assiégée et prise, mais sans Boniface. Le pape Innocent III est scandalisé, il excommunie Vénitiens et croisés.

La croisade détournée

Entre-temps Boniface profite pour se rendre à Rome chez son cousin Philippe 1er de Souabe (fils de l’empereur germanique Frédéric Barberousse et roi des Romains de 1198 à 1208). Il rencontre alors Alexis IV Ange (fils d’Isaac II Ange empereur byzantin) que son oncle Alexis III Ange avait chassé du trône. Dépossédé il veut récupérer son empire. Il propose au chef des croisés le paiement de la dette aux vénitiens, en contrepartie d’une aide pour reconquérir Constantinople et Byzance. Les deux hommes prennent la route de Corfou, où les attendent la flotte des croisés vainqueurs à Zara. Devant les hésitations de croisés à lever l’épée sur des chrétiens, le clergé catholique arrive à convaincre que les Byzantins orthodoxes sont tout aussi mauvais que les musulmans. La quatrième croisade est détournée, les croisés foncent sur Constantinople. Après un siège de plusieurs jours, la ville est prise le 12 avril 1204. Alexis IV ne peut pas tenir son engagement de payer la dette des croisés aux Vénitiens. La terreur s’abat alors sur les Grecs, leurs femmes et leurs filles, avant de procéder au pillage systématique (reliques et trésors de réputation, nourriture…) de la cité. Alexis IV reprend son trône mais il est vite assassiné. Même si selon un accord conclu entre eux, chefs vénitiens et croisés se répartissent le gros de l’empire byzantin, Venise est la grande gagnante de cette expédition et de la création d’un Empire latin d’Orient.

La quatrième croisade est donc un échec total, car aucune tentative de continuer jusqu’à la Terre sainte n’a lieu. Mais elle reste un tournant important de l’histoire du Mayen âge. La chute de l’Empire byzantin est à l’origine de diverses conséquences : politiques, territoriales, économiques, culturelles. Les relations entre l’Occident et l’Orient, entre la chrétienté latine et l’orthodoxie sont désormais affectées.

Cœur de Lion en route pour la croisade

La « croisade des rois » face à Saladin 

Après la seconde croisade, l’Orient et l’Occident musulmans et chrétiens vivent de nouveau assez souvent en bons termes. Plutôt un statut quo qui semble arranger tout le monde. Mariages mixtes et échanges commerciaux se multiplient. A ce moment l’Egypte et la Syrie sont  dirigées  par un sultan du nom de Salâh al-Dîn (Saladin). Personnage important du Levant, car il y avait étendu son règne et avait pris soin aussi de bâtir de bonnes relations avec les chrétiens. Mais Saladin n’apprécie pas le comportement de certains seigneurs de guerre zélateurs, que ce statut quo n’arrange pas. Après  avoir défait les chrétiens à Hattin ou Attîn, il s’empare  de Jérusalem le 2 octobre 1187 et rend l’ensemble de la Palestine aux musulmans. Les forces chrétiennes sont repoussées jusqu’ à  Tripoli et Tyr (Liban),  Antioche (Turquie), Margat (Syrie). L’Occident chrétien va devoir  partir pour la troisième fois en croisade. Elle sera cette fois celle des rois, car allait être menée  par Frédéric de Hohenstaufen dit Barberousse (empereur Germanique), Philippe Auguste (le roi de France) et Richard Cœur de Lion (le roi d’Angleterre). Avec ces trois puissants souverains elle avait toutes les chances d’aboutir, et pourtant.

Quand Philippe Auguste faillit

La croisade des rois connait un drame le 10 juin 1190, avant même d’arriver à son but. Barberousse se noie dans les eaux glacées d’un torrent  de Cilicie (sud de la Turquie actuelle) en voulant prendre un bain pour certains, en traversant une rivière avec son armure pour d’autres. Philippe Auguste de son côté se démobilise et décide de rentrer au pays, ce qui est considéré comme une trahison. Il veut profiter de l’engagement de Richard dans cette aventure,  pour  s’emparer des  possessions en terre française de ce dernier. Abandonnés par les autres, le roi Anglais et ses hommes se battent  héroïquement  seuls. Il est sur le point de marcher sur Jérusalem, mais entre temps Saladin avait reçu d’importants renforts  et bien fortifié la ville. C’est  que celui-ci tenait aux lieux saints plus que tout. Richard comprend vite qu’il serait bien périlleux de continuer à se battre. Il se résigne à conclure un accord avec un adversaire qu’il, par ailleurs, respecte pour sa vaillance: Jérusalem restera  sous contrôle musulman, mais les pèlerins chrétiens non armés pourront s’y rendre en toute quiétude. Richard obtient aussi que la bande qui va de Jaffa à Haïfa, le long de la mer Méditerranée, soit cédée aux chrétiens. C’est avec cette issue quelque peu honorable, qu’il  rentre chez lui vers la fin septembre. Ainsi s’achève la troisième croisade comme la seconde, sans que Jérusalem ne soit revenue aux mains des chrétiens.

 

Saint Bernard prêchant la croisade

La croisade de Louis VII et de Conrad III

Victorieux lors de la première croisade, les croisés établissent un nouveau royaume chrétien à Jérusalem. Des ordres de chevaliers comme les Hospitaliers et les Templiers voient le jour. En 1100 Godefroy de Bouillon (Avoué du Saint-Sépulcre) décède, son frère Baudouin (dit le Lépreux) est couronné le 25 décembre de la même année roi de Jérusalem. La paix reste précaire, elle n’est maintenu que grâce à la manipulation des tribus arabes que la rivalité opposent et qui s’entredéchirent sans cesse. Mais la vraie menace va encore venir des Turcs.

Le 24 décembre 1144, la forteresse frontalière d’Édesse tombe et le Comté est repris aux chrétiens par  Zengi de Mossoul (Irak). Le royaume chrétien de la ville sainte, l’Occident chrétien et la chrétienté même sont de nouveau menacés. Bien que tardivement, le pape Eugène III émet le 1er décembre 1145 la bulle pontificale Quantum praedecessores pour appeler à une nouvelle croisade. Son appel reste sans échos. Et c’est Saint Bernard de Clairvaux (moine et réformateur français. Il est canonisé par l’Église catholique en 1174)  grande figure de la Chrétienté orateur notoire de l’époque qui se charge de convaincre. En mars 1146 il prêche à Vézelay à côté du roi de France Louis VII devant des milliers de personnes, promettant grâce et l’absolution de tous les péchés commis à ceux qui se joindront aux croisés. La foule est conquise, elle s’empare de toutes les croix qu’il avait préparées, des centaines d’autres en réclament. Il sillonne ensuite l’Europe pour rassembler des combattants pour stopper et refouler les Turcs chez eux. Cette seconde croisade il la veut populaire. En décembre de la même année, il obtient la participation de Conrad III, empereur du Saint Empire romain germanique. Plus que cela, d’autres souverains européens se joignent à l’entreprise. On citera Aliénor d’Aquitaine, reine de France ; Ier de Dreux, frère de Louis VII ; Thierry d’Alsace, comte de Flandres ; Alphonse Ier Jourdain, comte de Toulouse et bien d’autres nobles et évêques.

Conrad III n’attend pas Louis VII comme convenu. En avril et mai 1147 des armées germaniques, fortes de 100 000 hommes, quittent Nuremberg et Ratisbonne en direction de Constantinople. Alors que les armées croisées françaises parties en juin arrivent dans cette ville en octobre 1147, celles de Conrad III se faisaient massacrer à Dorylée (Turquie) le 25 du même mois par les Turcs Seldjoukides de Kılıç Arslan. Principales forces des croisés, elles perdent les neuf dixième de leurs effectifs. Autant dire que cette croisade dite populaire est vouée à l’échec.

Arrivés à Saint-Siméon les forces françaises sont accueillis par le comte de Poitiers, alors prince d’Antioche (ville de Turquie près de la frontière syrienne). Celui-ci tente de convaincre Louis VII de conquérir Alep (Syrie) tenue par Nûr-el-Dîne et les Zengîdes qu’il considère comme les ennemis les plus dangereux. Ceux ci ambitionnent d’unir tous les musulmans pour « purifier » la Syrie et la région en la débarrassant des chrétiens. Mais le roi préfère rejoindre Jérusalem, qui n’était portant pas le but de la croisade car celle-ci n’est pas jusque là menacée suite à la chute de la dynastie fatimide. Durant ce séjour en terre sainte, le souverain français prend même la décision d’attaquer Damas alors que Foulques d’Anjou roi de Jérusalem avait avant son décès conclu un traité de paix avec l’émir de cette ville. Après un siège de quelques jours, le roi décide  de se retirer avec ses hommes d’autant plus qu’il ne peut plus compter sur Conrad pour mener à bien cette seconde entreprise sainte. C’est la fin de la deuxième croisade, qui n’a été qu’une succession d’échecs et d’humiliations. Les croisés rentrent chez eux après avoir perdus une bonne majorité d’entre eux, et sans aucune victoire militaire. De Rome aux évêques, en passant par la cour du roi de France, on impute l’échec de ce pèlerinage guerrier à Saint Bernard. Il souffrira longtemps de cette humiliation. Défaits lors de la première croisade à Dorylée, les Ottomans quant à eux ont pris leur revanche sur le même lieu de bataille.

Les croisés arrivent en Terre sainte

Quand le pape Urban II appelle aux armes 

Les Turcs Seldjoukides envahissent la région (Moyen-Orient) vers 1095. Ils occupent notamment  la Mésopotamie, la Syrie, la Palestine et ses lieux saints. L’occupation de Jérusalem qui abrite le Saint sépulcre, donc la tombe du Christ, choque et indigne l’Occident Chrétien. Dès lors ceux qu’il considère comme des infidèles persécutent les pèlerins chrétiens venus de toute l’Europe, et les empêchent même de se rendre aux lieux saints.

La libération de Jérusalem et répondre à l’appel des Byzantins (Empire romain d’Orient) objets d’attaques des musulmans, ne sont pas les seules raisons qui motivent l’envoi de combattants d’Europe. Pour le Pape Urban II une guerre sainte est une bonne opportunité pour ramener la paix à l’intérieur de la chrétienté, que la Paix de Dieu et la Trêve de Dieu ne sont pas arrivées à instaurer. Proclamer la croisade c’est aussi détourner la violence des chevaliers vers une noble cause (moraliser la chevalerie), et surtout mettre fin au brigandage, au pillage et à la rapine des centaines de jeunes formés aux armes mais désœuvrés, en les envoyant se faire tuer. D’autres non-dits sont des facteurs d’ordre politique et économique.

C’est lors du consil de Clermont qui réunit Urbain II et les évêques le 27 novembre 1095 qu’est proclamé officiellement la Croisade pour reprendre le Saint-Sépulcre aux musulmans. Dans son discours qu’il achève par « Voici le moment du vrai courage , voici une guerre juste et sainte », le pape invite les chrétiens à l’usage des armes. En signe d’approbation, la foule répond par « Deus lo volt » (Dieu le veut). La voulant populaire, le pape sillonne la France promettant une rémission de leurs pêchés, la promesse d’une vie éternelle à tous ceux qui mourront lors de cette sainte guerre. Avec Pierre l’Ermite prédicateur populaire et influent, des milliers de personnes rejoignent le première Croisade. Elle est dirigée en 1096 par Raymond IV (comte de Toulouse), Bohémond Ier (prince de Tarente et d’Antioche), Godefroy de Bouillon (chevalier), Tancred (chevalier). Au moins 30 000 hommes, dont beaucoup de pèlerins désireux juste de se recueillir sur la tombe de Jésus, prennent la route des lieux saints qui par route qui par mer. Partis plus de deux ans et demi plus tôt, les croisés arrivent à Jérusalem après des combats sanglants, tant de  privations et d’épreuves. Après un long siège, ils s’emparent enfin de la ville en 1099. Un nouveau royaume chrétien et deux nouveaux ordres de chevaliers (les Hospitaliers et les Templiers) sont instaurés. Godefray de Bouillon considéré comme le héros de cette expédition rejette le titre de  roi qu’on lui propose, et qui l’oblige à porter une couronne en or dans un lieu où Jésus l’avait porté en épines et souffert. Il le troc pour celui d’Advocatus Cancti Sepulchri (Avocat du Saint-Sépulcre ou tombeau du Christ). La terre sainte vit de nouveau dans la stabilité et la cohabitation entre musulmans, chrétiens et juifs, du moins en apparence. Pas pour longtemps.